The Science of Osteopathy : notes et réflexions

Parmi les ostéopathes fondateurs de la discipline, John Martin Littlejohn demeure un nom incontournable. D’origine écossaise, il part à la rencontre d’Andrew Taylor Still et devient ostéopathe. En 1900 il écrit The Science of Osteopathy. Un texte pionnier qui ramène aux sources de l’ostéopathie. Je vous propose quelques notes de lecture et réflexions sur ce livre.

Première de couverture du livre de John Martin Littlejohn, The Science of Osteopathy, dans le cabinet d'ostéopathie de Romagnat au sud de Clermont-Ferrand

Des concepts généraux de l’ostéopathie

L’idée principale qui parcourt ce court livre de 30 pages et que je retiens avant tout correspond à ce que l’on nomme la loi de l’artère. Littlejohn insiste tout le long du livre sur l’importance de la libre circulation des liquides organiques et des information nerveuses. Il reprend notamment des mots d’A.T. Still : une circulation naturelle du sang correspond à la santé ; la maladie est l’effet d’une perturbation locale ou générale de cette circulation sanguine (p.7).

Celui ou celle qui aurait perdu cette notion de vue, ou qui souhaite la découvrir dans toute son historicité, peut parcourir quelques pages ou chapitres afin de renouer avec ce discours authentique.

Littlejohn évoque assez généreusement la capacité d’autorégulation du corps – qui va de pair avec la loi de l’artère. Selon lui, une nature vigoureuse et la force innée du corps permettent de rectifier les conditions d’apparition de maladies. Mais parfois la nature est faible et ne peut restaurer d’elle-même le corps à l’état normal. Alors l’Ostéopathie intervient pour assister la nature en manipulant le corps de façon à corriger ces mauvaises conditions (p.9). On perçoit donc dans le discours que ce n’est pas l’ostéopathie qui soigne mais bien la nature. L’ostéopathe ne fait rien d’autre qu’assister en cas de défaillance, de faiblesse. Il assiste donc le corps, qui non seulement est un mécanisme parfait, mais aussi le plus merveilleux des laboratoires chimiques qui puissent exister dans l’univers (p.14).

Pris à la lettre, cette vision d’idéal, de complétude de la chimie interne de l’homme nous rappelle les carences dans les connaissances de la fin du 19ème siècle comparée à celle d’un siècle plus tard.

En effet l’avis d’un botaniste serait tout autre concernant le plus merveilleux laboratoire chimique de la nature… Jean-Marie Pelt nous dit qu’à cet égard, la comparaison des capacités synthétiques des plantes et des animaux est très suggestive : faute d’être capables de réaliser la photosynthèse, les animaux ont en quelques sorte abandonnés aux plantes qu’ils mangent le soin de soin de fixer le carbone et l’azote, de fabriquer des pigments, des vitamines, des antibiotiques, des hétérosides, des alcaloïdes, des terpènes – toutes substances qu’ils sont pratiquement incapables de fabriquer, du moins en grand nombre ; ils ne savent pas même réaliser la synthèse du noyau benzénique et des structures terpéniques si fréquentes chez les plantes, de sorte que, hormis le domaine des hormones où ils sont en quelque sorte spécialisés, leurs performances chimiques sont plus que modestes (Jean-Marie Pelt, La médecine par les plantes, Fayard, 1986, p.186)
Et Jean-Marie Pelt de rajouter : mais à quoi bon fabriquer à grand peine ce que votre nourriture vous apporte ?

Alors en effet Littlejohn est critiquable sur ce point « chimique ». Néanmoins il a conscience que l’homme agit au milieu de son environnement et que c’est aussi de celui qu’il tire sa bonne santé. Il encourage à ce titre à une alimentation saine et variée, en quantité suffisante ainsi qu’à l’exercice musculaire tout en nous prévenant des excès alimentaire (p.17) et rejoint à ce titre les propos de Jean-Marie Pelt.

Aussi l’accès aux médicaments est quelque chose qu’il proscrit, aucune médication superflue n’est nécessaire (p.17). Il propose une vision selon laquelle la thérapeutique médicamenteuse se base sur la pathologie, la symptomatologie et la pharmacologie alors que la thérapeutique ostéopathique se base sur les principes de fonctionnement chimiques, physiques et vitaux du corps humain sain (pp.21-22).

Photo d'une coupe de fruits rouges symbolisant l'alimnetion saine que suggère Littlejohn

L’unité du corps fait également partie intégrante du discours de Littlejohn (pp.15-16). Chaque organe et chaque partie du corps semble savoir, au moins de façon inconsciente, qu’il forme une partie d’un tout bien plus grand (p.16).
En cela on pourrait retrouver la notion de Conscience Holographique proposée par Michel Odoul (Dis-moi où tu as mal, je te dirais pourquoi, Albin Michel, 200, p.27). C’est cette Conscience Holographique qui permet de mieux comprendre comment peut s’ordonner la croissance cellulaire depuis l’œuf jusqu’à l’homme (ou l’animal), ainsi que le processus de renouvellement cellulaire.
Aussi l’unité du corps nous apparait-elle non seulement comme le lien entre les différentes parties et organes qui le compose, mais aussi comme la somme de subconsciences qui se potentialisent mutuellement pour former une conscience transcendante.


 

Corps, esprit, âme

Et Littlejohn ne semble pas avoir une vision purement somatique : le corps est un mécanisme parfait, constitué de plusieurs parties, essentiellement deux que l’on nomme le corps et l’esprit. Le fonctionnement harmonieux et dynamique de toutes les parties de cette machinerie parfaite constitue la santé (p.11). On pourrait reprocher cette vision dichotomique du corps et de l’esprit mais replaçons-nous dans ce contexte de fin du 19ème siècle…
Littlejohn va même plus loin lorsqu’il dit : l’ostéopathe croit en l’esprit comme le facteur dominant dans la vie ; l’esprit étant l’élément principal en connexion avec le corps. Mais il ne croit pas que dans la santé mentale on puisse trouver une panacée pour toutes les maladies qui affectent l’humanité (p.22).

Cependant la part religieuse et spirituelle me parait conflictuelle dans son discours. A la fois il nous dit que la materia medica est purement physiologique, et donc matérielle, sans relation d’aucune sorte à la spiritualité ou à la Science Chrétienne (p.25). Et peu de temps avant il évoquait le chef-d’œuvre de la nature et de Dieu (p.11). Il donne même une citation en première page sans la commenter : il n’y a rien qui rapproche plus l’homme des Dieux que le fait de rendre la santé à ses congénères mortels (p.1).

Alors je dirais que Littlejohn veut bien accorder à Dieu, ou aux Dieux, la conception, l’élaboration de la nature et de l’homme dans tout ce qu’ils peuvent avoir de parfaits et harmonieux. Mais l’action de l’ostéopathe, elle, ne relève pas de ce domaine. Elle est purement, simplement aurais-je envie de dire, physiologique avec toute la connotation mécanique, tangible et concrète que ce mot peut avoir.

Le discours de Littlejohn laisse donc soupçonner d’un profond respect pour la Nature et ce qu’elle accomplit chaque seconde. Plus encore je parlerais d’admiration. Il semble par ailleurs vouloir prendre une distance avec Dieu, notamment quand il s’agit d’évoquer l’action de l’ostéopathe. Ce fait me parait d’actualité et rappelle combien l’ostéopathie n’est pas tout-puissant. Littlejohn nous rappelle également pleinement que la place de l’homme est au milieu de son environnement et qu’il doit puiser dans ce dernier les éléments naturels propices à sa bonne santé.


Pour aller plus loin :

  • lire The Science of Osteopathy. Its value in preventing and curing disease, John Martin Littlejohn
  • La médecine par les plantes, Jean-Marie Pelt
  • Dis-moi où tu as mal je te dirais pourquoi, Michel Odoul

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